Je marche seul dans une ruelle sombre et étroite. À quelques mètres, des voix s’élèvent. Une dispute éclate. Puis, un bruit sourd. L’un des deux hommes s’écroule, son adversaire vient de lui asséner un violent coup de poing en pleine figure.
Sur le trottoir, le sang coule et finit par se répandre sur la chaussée.
Une femme sort du bar en hurlant :
« Il faut que quelqu’un appelle les secours ! »
Malgré ses cris, les témoins restent figés, comme paralysés. Personne ne bouge.
Je m’approche de l’homme à terre et fouille ses poches à la recherche de son portefeuille, espérant y trouver sa carte d’identité ou son permis de conduire. Puis, je sors mon téléphone de la poche arrière de mon pantalon et compose le numéro des secours.
« Ne bougez surtout pas, une patrouille arrive en urgence. »
Il est tard. L’agresseur a déjà pris la fuite.
Les sirènes retentissent derrière moi. Les secours se garent le long de la route. Une femme sort du véhicule, ouvre les portes arrière et déplie une rampe d’accès avant d’en sortir un brancard.
« Monsieur, avez-vous vu ce qu’il s’est passé ?
— Aucune idée, je me trouvais à quelques mètres lorsque j’ai entendu un cri. J’ai vu la victime sur le sol.
— Savez-vous qui était sur les lieux et qui aurait pu assister à la scène ?
— Cette femme, là-bas, assise à l’intérieur. »
J’aperçois une silhouette juste derrière elle. Quelque chose me trouble. J’ai du mal à distinguer ses traits, mais cette personne ressemble étrangement au petit garçon que j’ai croisé à la piscine.
« Monsieur, vous m’entendez… ? »
La voix de l’agent résonne dans ma tête, mais je ne réponds pas. Mon regard est rivé sur cette silhouette. Je me détourne et entre dans le bar pour approcher le jeune garçon.
« Comment tu t’appelles ?
— Aidez-moi, s’il vous plaît… J’ai très mal à la tête.
— Que se passe-t-il ? Raconte-moi. »
Il ne répond pas. Il reste là, immobile, les yeux plongés dans les miens. Je ressens sa douleur, sa détresse. Des larmes coulent sur ses joues rouges.
Ses mains et ses bras sont violets.
J’ai l’impression qu’il est mort.
Puis, il se retourne… et du sang gicle sur mon visage.
« Vite, UN MÉDECIN ! »
Toc, toc, toc.
Quelqu’un frappe à la vitre de ma voiture. De plus en plus fort.
« Réveillez-vous, sinon je casse la vitre ! »
J’ouvre brusquement les yeux. Mon cœur bat à tout rompre.
Dehors, il pleut. Il fait jour.
Un homme se tient là, sur le parking, essayant en vain de me réveiller.
Ce rêve… Il m’a terrifié.
Que se passe-t-il dans ma tête ?
C’est la deuxième fois que je vois ce petit garçon, mais je ne sais toujours rien de lui. Même pas son nom.
Étrange.
Je prends une profonde inspiration et démarre le moteur. Sur le GPS, je saisis ma destination : Toronto.
Encore six heures de route avant d’arriver au poste de police.
Mon téléphone sonne.
« Hammer, vous en êtes où ? Tout le monde vous attend ! Vous êtes en retard !
— Un imprévu… Je fais au plus vite. Il me reste environ six heures de route. »
À peine dix mètres plus loin, un bruit métallique résonne derrière moi.
Comme une casserole qui traîne sur l’asphalte.
Je soupire.
Un pneu crevé.
J’ai vraiment pas de chance.